mai 2024

Dans cet interview, Céline Nieuwenhuys souligne le décalage entre le politique et la situation du monde. Elle rappelle l'urgence et la nécessité de donner des réponses collectives et d’œuvrer ensemble à la construction du monde de demain.

Céline Nieuwenhuys, secrétaire générale de la Fédération des services sociaux, était l'invitée de Matin Première, par Thomas Gadisseux.

A l'aune des élections de juin 2024, Céline Nieuwenhuys souligne le décalage entre la campagne électorale actuelle et la situation du monde: qu'elle soit géopolitique, climatique, sociale, politique, etc. elle souligne aussi l'absence de construction de réponses collectives face à l'ensemble de choses qui vont nous arriver. Selon elle, «on ne prend pas assez soin de ceux qui prennent soin», la réalité des services sociaux est frappante : les métiers du soin sont en pénurie et font face à de nombreux obstacles, notamment le poids considérable des charges administratives qui pèse sur le secteur. Les travailleurs·euses sociaux·ales passent davantage de temps à remplir des procédures administratives qu’être au contact des personnes. Il est nécessaire « d’obtenir un allégement de ce travail froid alors qu’on n’a jamais eu autant besoin de solidarité chaude ».

Quelques extraits :

"On est, au XXI ° siècle, face à des basculements majeurs et on ne parvient pas à sortir de nos rails. Ça ne veut pas dire qu'il ne se passe rien, il y a un foisonnement de savoirs et de pratiques qui sont là pour préparer le monde de demain et on y fait pas assez appel".

"La solidarité qui devrait être le maître mot au niveau international et au niveau national n'est pas là. Il y a ce décalage de plus en plus fort entre les décisions qui sont prises et l'état du monde".

"Les métiers du soin restent en pénurie, restent en difficulté, restent en souffrance. On a jamais eu autant besoin de soin; c'est la questions des agriculteurs qui essayent de prendre soin de leur terre, c'est la question des infirmiers et infirmières, la question de l'enseignement, de la petite enfance etc. [...] On ne prend pas assez soin de ceux qui prennent soin. Ça veut dire que le repère aujourd'hui, dans ce monde en basculement, ça reste la performance et non pas le soin".

"Les personnes précaires et les personnes qui prennent soin de personnes précaires sont dans un colère et une fatigue qui est du pain bénit pour l’extrême droite. [...] L’extrême droite c'est une fabrique de destruction des pauvres, pas de destruction de la pauvreté".

"Il faut absolument et urgemment prendre soin de ceux et celles qui prennent soin, leur faire plus confiance, les protéger mieux et surtout les libérer d'une charge administrative et institutionnelle qui est une maladie dans notre société".

"Si j'avais une recommandation à pointer, c'est celle de l'audace. Nous avons besoins de pratiques audacieuses, artisanales, des pratiques dans des quartiers, avec des gens, dans des lieux chaleureux. Ça devient urgent d'aller vers les gens et de leur proposer de construire ce monde de demain ensemble".

Céline Nieuwenhuys