Policy briefDeux indicateurs associés à la précarité des jeunes aux études : le nombre de bénéficiaires d’un PIISE et le nombre de jobistes
Cette note produite dans le cadre du Collectif InES est diffusée pour susciter et alimenter le débat public. Elle reste […]
Télécharger le Policy BriefCette note produite dans le cadre du Collectif InES est diffusée pour susciter et alimenter le débat public. Elle reste donc à ce stade une note de travail. Vous trouverez ci-dessous la synthèse de la note plus complète qui est elle, à télécharger.
La FEF a, au cours des dernières années, régulièrement attiré l'attention des médias et du monde politique sur ce qu'elle estime être l'augmentation de la précarité étudiante. Elle retient notamment les évolutions de deux indicateurs en appui de son évaluation : le nombre de jeunes bénéficiant du RIS appelé communément "RIS étudiant" (le nom exact est : PIISE – Projet individualisé d'intégration sociale étudiant), en hausse certaine et le nombre d'étudiants jobistes, lui aussi en hausse. Sans plus, ces deux indicateurs ne peuvent donner une évaluation rigoureuse de la précarité étudiante :
- ils portent à la fois sur les élèves du secondaire et sur les étudiants du supérieur sans qu'il ne
soit possible, en l'état actuel de l'appareil statistique, de faire la différence entre ces deux
populations qui, à plusieurs égards, ont des caractéristiques différentes ; - ils ne sont pas mis en perspective avec les évolutions des populations aux études.
En outre, il est un peu court d'assimiler ces deux indicateurs automatiquement à de la précarité. Certains élèves/étudiants bossent – au moins en partie – pour des loisirs ou voyages. Il y aussi les étudiants qui sont autorisés à bosser durant l'été après la fin de leurs études. Par ailleurs, on peut aussi lire la montée en phase du nombre de jeunes bénéficiant d'un PIISE comme étant expliquée – en partie en tout cas – par l'arrivée dans le supérieur de jeunes qui n'y auraient peut-être pas accédé précédemment.
A défaut d'informations solides et sur une longue période permettant de discerner les motivations et de distinguer différentes sous-populations, la note complète se concentre sur les populations globales de jeunes aux études, de ceux.celles qui jobent (quelles que soient les motivations) et de ceux.celles qui bénéficient d'un PIISE (quelles qu'en soient les raisons).
Parce qu'ils constituent l'immense masse des jeunes aux études et pour des raisons de disponibilité statistique, l'analyse porte sur les 18-24 ans distingués en deux sous-populations : les 18-19 et 20-24 ans. Encore une précision : les séries temporelles démarrent avec l'année scolaire/académique 2010- 2011 (en 2012-2013 pour les étudiants jobistes).
Rappel méthodologique : les résultats ci-après concernent les jeunes de 18-24 ans aux études (secondaire et supérieur) domiciliés à Bruxelles ou en Wallonie
Voici les principaux résultats de l'analyse descriptive.
Concernant les jeunes aux études bénéficiant d'un revenu d'intégration étudiant (PIISE)
- a proportion de jeunes de 18-24 ans aux études bénéficiant d'un PIISE est passée de 4,5% à 9,0% entre 2010-2011 et 2021-2022, soit un doublement ;
- l'augmentation est plus marquée à Bruxelles qu'en Wallonie ;
- la proportion de jeunes aux études bénéficiant d'un PIISE est plus importante à Bruxelles qu'en Wallonie (environ le double) ;
- la proportion des 20-24 ans bénéficiant d'un PIISE est plus importante que pour les 18-19 ans ;
- on peut, sur base des évolutions disponibles, penser qu'une partie de l'augmentation des PIESE s'explique par un octroi plus large du dispositif par les CPAS.
Concernant les jobistes étudiants pendant l'année scolaire/académique :
- en moyenne, la proportion de jeunes de 18-24 ans aux études jobant pendant l'année scolaire académique est passée de 21,7% à 41,6% entre 2012-2013 et 2021-2022, soit presque un doublement ;
- la proportion de jeunes qui jobent est plus ou moins la même en Wallonie qu'à Bruxelles et ce pour les deux catégories d'âges ;
- la proportion de jeunes jobant est plus élevée pour les 20-24 ans que pour les 18-19 ans.
Voici le tableau qui résume les observations :
A notre connaissance, c'est la première fois que ces calculs sont faits, en tout cas rendus publics. C'est pourtant le b.a.-ba en la matière ; n'avoir pas fait ces calculs jusqu'ici permet d'entretenir des représentations douteuses. Pourquoi une telle paresse intellectuelle et une telle négligence politique (paresse et négligence dont la responsabilité est partagée entre plusieurs acteurs) ?
Deux autres observations importantes complètent ce tableau général.
On rappellera d'abord qu'au sein des deux régions, le pourcentage de jeunes bénéficiaires d'un RI ou d'une ASE (aide sociale équivalente) de 18-24 ans qui ont signé un PIISE varie très fort d'un CPAS à l'autre:
- en région bruxelloise, cela va de 58,2% à Schaerbeeck à 19,9% à Ixelles ;
- en Wallonie, si on exclut les communes où il y a moins de 20 bénéficiaires du RIS ou d'un ASEde 18-24 ans, cela va de 79,6% à Braine-le-Château à 8,2 % à La Hulpe ; ces pourcentages s'étalent de 51,8% à La Louvière à 26,6% à Charleroi au sein des grandes villes wallonnes.
On trouvera ici les données pour les communes des 2 régions et pour les 2 catégories d'âges pendant l'année académique 2022-2023.
Pour partie en tout cas, le travail étudiant répond à des comportements différents entre l'année scolaire/académique et les "grandes vacances" et peut de ce fait avoir des impacts différenciés sur le taux de réussite. A cet égard, on fera observer que, dans les deux régions et pour les deux catégorie d'âge, le nombre de jobistes et le temps de travail moyen ont augmenté plus durant l'année scolaire/académique que pendant le 3ème trimestre.
Pour le reste, le lecteur intéressé trouvera dans la note complète plus de données et analyses. Cette note se termine en proposant quelques orientations pour de futurs travaux. Le travail d'analyse ne fait en effet que commencer. Il appelle, ce qui n'est pas gagné d'avance, la récolte et l'échange de nombreuses données et analyses, l'articulation de banques de données, une approche statique et une approche dynamique et la collaboration de tous les acteurs (mise en commun de données et d'analyses). C'est la condition pour dépasser les simplismes et autres représentations grossières et, espérons-le, jeter les bases d'une nouvelle approche, globale et inclusive, sur l'accès aux études supérieures et l'acquisition de compétences validées.